La métamorphose de Narcisse



Cette toile peinte par Dali en 1936 s’impose, tout d’abord sur le plan technique, par les spécialistes comme un phénomène optique. Pour que l’effet se réalise, l’admirateur doit provoquer chez lui un strabisme engendrant un dédoublement des deux images similaires (narcisse et la main). En accentuant le strabisme, les deux dédoublements se chevauchent au centre de la toile pour ne former qu’une image unique, une unité. Il y a donc à la fois destruction et réunification demandant un travail psychique pour établir des liens les formes. Ici, Narcisse, à gauche, symbolise l’homme s’octroyant valeur et beauté et vivant dans la seule considération de lui-même car il se regarde le nombril. Ce Narcisse est immobile ce qui sclérose son âme, sa conscience et son intelligence. Cette immobilité le fossilise en bloc de matière de couleur douce, se rapprochant du calcaire, le fondant dans roches de l’arrière plan, lui donnant enfin l’aspect d’un mort vivant. Derrière Narcisse, une dizaine de personnages prennent des poses, se regardent et s’écoutent, intensifiant ainsi l’empreinte du narcissisme. L’homme sur le piédestal renforce naturellement cette idée. Le ciel aux nuages à tendances rouges est signe d’apocalypse mais dans la main, à droite, l’homme se libère de son orgueil. Pour cela, l’homme figé renaît en une Main d’Homme symbolisant l’activité. Celle-ci engendre un Nouvel Homme dû à l’éclosion de l’œuf. Cette Main traduit l’efficacité car elle n’est ni volage, ni inconsciente, ni paresseuse d’esprit et d’efforts comme Narcisse. De ce nouvel œuf naît un nouveau dieu sous forme de nouvelle fleur (narcisse). De l’œuf s’échappe la partie démoniaque de l’ancien Narcisse sous forme de serpent. Pour dernière remarque, on peut dire que dans la toile, Narcisse s’endort à cause de son orgueil, celui-ci devenant narcotique, on terminera en affirmant que Narcisse est en narcose (même racine).